Changer ses habitudes énergétiques au travail ? Plus facile à dire qu’à faire. C’est ce qu’a brillamment illustré Louna Malbrunot, psychologue sociale et cheffe de projet CEEBE au Cerema, lors de la seconde réunion candidats du concours CUBE ÉTAT, le 18 mars 2025.
Son intervention a levé le voile sur une évidence souvent négligée : l’humain est au cœur de la transition énergétique, et pour embarquer tout le monde, il ne suffit pas de diffuser une bonne information.
Des freins invisibles mais puissants
Pourquoi ne sommes-nous pas toujours « écolos » au bureau ? Louna a identifié plusieurs freins bien connus en psychologie sociale :
La charge mentale : difficile de penser écogestes quand on a déjà mille priorités.
Le manque d’appropriation des lieux : on agit plus volontiers dans un espace auquel on se sent appartenir.
L’inconfort ou l’incompréhension : les gestes demandés semblent parfois contraignants ou opaques.
La complexité de l’information : trop de données tue l’action.
Informer ne suffit pas : les biais cognitifs à l’œuvre
Même face à des arguments rationnels, notre cerveau a ses raccourcis. Deux biais clés expliquent l’inertie face au changement :
Le biais du statu quo (Samuelson & Zeckhauser, 1988) : on préfère garder ses habitudes, même si elles ne sont pas optimales.
Le biais de conformité (Asch, 1951) : on s’aligne sur la majorité, parfois plus par besoin d’appartenance que par conviction écologique.
Un bon exemple ? Afficher que « 80 % des agents baissent leur chauffage » peut être plus efficace que n’importe quelle infographie technique.
Le changement est un processus… pas un interrupteur
Changer d’habitude prend du temps. Louna a présenté le cycle du changement, qui va de la pré-contemplation (« je ne me sens pas concerné ») à l’action, puis au maintien… et parfois à la rechute. L’accompagnement doit être progressif, pluriel et bienveillant : démos, journées de mobilisation, encouragements, rappels, leaders d’opinion…

De la motivation extrinsèque à l’engagement durable
Selon la théorie de l’autodétermination (Deci & Ryan), pour que la motivation soit durable, il faut satisfaire trois besoins fondamentaux :
L’autonomie : pouvoir choisir et proposer (ex : ateliers plans d’action)
Le sentiment de compétence : comprendre, savoir faire (ex : diagnostic participatif)
Le besoin d’appartenance : se sentir impliqué dans un collectif (ex : équipe projet CUBE)
Les récompenses (trophées, médailles) et la valorisation (prix thématiques) peuvent encourager les premiers pas, mais l’essentiel est de créer les conditions d’un engagement profond.
Le collectif, levier puissant du changement
Enfin, plusieurs leviers sociaux permettent de transformer les intentions en actions :
L’argument d’autorité (Milgram, 1963) : une hiérarchie engagée est motrice.
La dynamique de groupe : faire du changement une norme sociale.
La théorie de l’engagement (Cialdini, 1984) : un agent engagé publiquement est plus enclin à persévérer.
Mais attention aux freins relationnels : l’iniquité, l’incohérence ou l’inconfort peuvent tout saboter.
L’essentiel à retenir ?
Le changement durable ne se décrète pas, il se construit. Et pour ça, il faut des stratégies humaines autant que techniques. Merci à Louna Malbrunot pour cette plongée précieuse dans les mécanismes du changement comportemental !
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